Une séance-type de psychothérapie avec une approche maïeusthésique.

Cette séance se déroule entre un praticien et un patient ayant fait une tentative de suicide.

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Soignant : Vous avez souhaité mourir ?

Patient : Oui, vous auriez mieux fait de ne pas me tirer de là [violence].

Soignant : D’accord… Vous regrettez qu’on vous ait sauvé ! ? [ ! ? : permet de ponctuer la reformulation. Affirmation reconnaissante, mais légèrement interrogative.]

Patient : Oui.

Soignant : [validation non verbale] C’était douloureux à ce point ! ?

Patient :  Je n’en peux plus [larmes].

Soignant : [validation NV*]. Qu’est-ce qui est si douloureux ?

Patient : Ça ne sert à rien de vivre quand on ne vaut rien comme moi.

Soignant : OK… Vous avez le sentiment que vous ne valez rien ! ?

Patient : Vraiment rien du tout. Je ne suis qu’une merde [dégoût].

Soignant :  À ce point ? Qu’est-ce qui vous donne ce sentiment que vous ne valez vraiment rien ?

Patient : Personne n’a jamais fait attention à moi.

Soignant : D’accord… Il y a des personnes particulières dont vous espériez l’attention ?

Patient : Mon père n’a jamais vu que j’existais.

Soignant : [validation NV] Cela vous a beaucoup manqué ! ?

Patient : Oui

Soignant : [Validation NV] Au point de vouloir mourir ! ?

Patient : Oui.

Soignant : Ça a été terriblement douloureux ! ? Qu’est-ce qui a pu amener l’homme qu’est votre père à ne pas vous voir ? [Là aussi nous parlerons de « l’homme qu’était son père » et non de « son père » afin que la personne ne redevienne pas « le petit garçon devant son papa », mais qu’il soit pleinement l’homme qu’il est face à l’homme qu’était son père.]

Patient : Il avait trop de soucis. Vous savez, il n’a pas eu une vie facile non plus. 

Soignant : OK. Est-ce que quelqu’un a déjà fait attention à lui ?

Patient :  Non. Lui non plus.

Soignant :  [Validation NV] Comment l’a-t-il vécu ?

Patient : Mal. C’est sûrement pour ça qu’il buvait.

Soignant : [Validation NV]. Vous pensez que ça a pu l’amener à boire ! ?

Patient : Oui, je me rends compte de ça.

Soignant : D’accord. Comment vous sentez-vous en évoquant tout cela ?

Patient :  Ça me fait du bien. Je n’avais jamais vu mon père de cette façon. J’ai l’impression de me sentir plus près de lui. Je n’avais jamais imaginé qu’il a ressenti la même chose que moi.
Je vous remercie vraiment d’avoir partagé cela avec moi.

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La compréhension que le soignant vient de donner au patient contribue à le réhabiliter, ainsi que son père.


Il sort ainsi un peu de la solitude et trouve une petite raison de vivre alors qu’il n’en avait plus.

Aussi modeste que cela semble, c’est très important. Si au contraire le soignant lui avait dit : « Il ne faut pas dire ça », « Vous comptez certainement pour votre père », « Et puis il y a des gens qui vous aiment à qui vous manqueriez trop », le patient, se sentant terriblement incompris, aurait encore plus été tenté par la récidive.

Même si ces phrases peuvent sembler justes, elles sont dangereuses quand elles viennent avant la validation du patient et de son ressenti. Elles ne peuvent être dites qu’après (si nécessaire).

Roland COYAC

31 juillet 2020

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